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État des lieux des violences LGBTQIA+phobes

La haine envers les personnes LGBTQIA+ reste une réalité alarmante en Belgique. Bien que les avancées législatives soient significatives dans notre pays, le progrès légal ne garantit pas le progrès social, et les discriminations et violences persistent. C’est la marque d’une tendance qui n’existe pas uniquement au niveau belge, mais se répand à l’ensemble des pays européens.

Bastien Bomans, le président de la Maison Arc-en-Ciel de Liège, alerte en effet sur un renforcement de l’homophobie et de la transphobie dans la société belge. On constate notamment des prises de position de figures politiques ou universitaires éminentes  contre le “wokisme” ou remettant en question l’inclusion. Ces déclarations s’inscrivent dans le contexte plus large des mouvements anti-genre, qui défendent des positions conservatrices contre les droits des femmes, l’égalité de genre, les droits sexuels et reproductifs et les droits LGBTQIA+. La montée des discours masculinistes contribuent également à renforcer ce climat idéologique hostile aux personnes LGBTQIA+.

Des chiffres

Parmi les 135 dossiers clôturés par Unia (institution interfédérale de lutte contre la discrimination) en 2024, 35% concernaient des actes de haine à caractère homophobe, lesbophobe ou biphobe. Plus d’un tiers de ces dossiers implique des agressions physiques, et un autre tiers du harcèlement grave. Les guet-apens homophobes tendus à travers les applications de rencontre sont en nette augmentation. Patrick Charlier, le directeur d’Unia, souligne le caractère intersectionnel de ces actes : une personne racisée ou en situation de handicap a deux fois plus de chance de subir une agression.

L’Institut pour l’Egalité des Femmes et des Hommes a reçu 154 dossiers concernant les personnes transgenres en 2024, particulièrement dans les domaines du travail, du milieu médical et des assurances. Moins de 1% des signalements reçus par l’IEFH en 2024 proviennent de personnes intersexuées, ce qui révèle la méconnaissance de leur réalité. L’invisibilisation des vécus des personnes intersexuées est une porte ouverte à l’interphobie et contribue au passage sous silence des mutilations génitales subies par de jeunes enfants.

A Bruxelles, la violence verbale LGBTQIA+phobe est très répandue (88%) et est parfois accompagnée de violence physique (33%), comme le constate safe.brussels grâce aux données fournies par la Rainbow House Brussels. Ces violences se manifestent de différentes manières : insultes, moqueries et remarques, violences sexuelles, matérielles et extorsions. Ces actes visent principalement les personnes visibles ou hors-normes comme les personnes queer, transgenres, non-binaires… Elles se déroulent dans l’espace public, à la suite de gestes d’affection ou à la vue d’une expression de genre jugée non-conforme.

À l’école, les jeunes LGBTQIA+ font également face à des violences et des discriminations, que ce soit par des insultes, des coming-outs forcés devant leur classe, le non-respect de leur nom et/ou leurs pronoms choisis. Une étude réalisée en 2023 par le Jeugdonderzoeksplatform pour mesurer le degré d’homophobie chez les jeunes en Flandre, montre en effet une montée marquée des LGBTQIA+phobies (32%) par rapport à une étude similaire faite en 2018 (20,4%), particulièrement chez les jeunes en fin de secondaire.

Au sein de l’Union Européenne, un tiers des personnes LGBTQIA+ fait quotidiennement face à des propos discriminants et plus de la moitié à du harcèlement à la suite d’une incitation à la haine. En France, le rapport de SOS Homophobie fait état d’un climat réactionnaire et d’une hausse de la banalisation des violences LGBTQIA+phobes. Les personnes transgenres et intersexes sont particulièrement visées : 23% des témoignages reçu par l’organisation concerne la transphobie.

Très peu de dépôt de plaintes

Malgré ces statistiques inquiétantes, seule une faible proportion de victimes déposent plainte. Selon une analyse de safe.brussels en 2024, un peu plus d’un acte LGBTQIA+phobe sur 10 a donné suite à une plainte. La raison principale de ce non-dépôt de plainte est un manque de confiance envers les forces de police. La seconde raison invoquée est l’inutilité ressentie de la démarche, puisque la majorité des plaintes dans ce type de dossiers est classée sans suite (et les victimes n’en sont pas informées, contrairement à ce qui est prévu par le code pénal). Enfin, quand il s’agit de violences au sein de la famille, certaines personnes ne souhaitent pas déposer plainte de peur d’un outing si elles rendent les violences subies publiques.

Quelles solutions ?

Les recommandations des organisations luttant contre les LGBTQIA+phobies se rejoignent : il faut avant tout reconnaître la complexité et l’intersectionnalité des situations vécues, et intégrer ces dimensions dans l’ensemble des politiques publiques. Le vécu des personnes concernées doit être centré dans les solutions proposées, et la lutte contre les LGBTQIA+phobie doit faire l’objet d’un plan d’action cohérent sur tous les niveaux de pouvoir. Rétablir la confiance envers les institutions, notamment la police, doit passer par un travail de sensibilisation des travailleur·euses concerné·es. Il est également important que les suivis des dossiers de plaintes soient assurés, du dépôt jusqu’à la procédure judiciaire. 

Pour en apprendre plus sur comment soutenir les victimes d’actes LGBTQIA+phobes ou quels sont les recours législatifs existants, MOSAIQ est là : rendez-vous sur la page "Discriminations et violences”.

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