
La transidentité désigne le fait que l’identité de genre d’une personne ne correspond pas au genre qui lui a été assigné à la naissance.
Chaque enfant, à la naissance, est rangé·e dans une case genrée binaire, fille ou garçon, sur base d’un examen rapide de ses organes génitaux externes réalisé par un·e professionnel·le de santé. Cette case déterminera pour l’enfant son prénom, mais aussi bon nombre d’attentes et de stéréotypes qui l’influenceront à jouer un rôle genré (“Les garçons sont turbulents, les filles sont sages.”).
Pour la majorité des personnes, cette assignation de genre à la naissance correspond à leur identité : on parle alors de personnes cisgenres. Mais ce n’est pas le cas pour tout le monde. Les personnes transgenres (ou trans) peuvent être des hommes trans (assignés filles à la naissance), des femmes trans (assignées garçons) ou des personnes non-binaires (en dehors ou entre les catégories homme/femme, assigné·e·s filles ou garçons).
Aujourd’hui, les termes trans et transgenre sont préférés à celui de transsexuel·le, car ils sont moins associés à une vision pathologisante de la transidentité. En effet, auparavant (et c’est encore le cas dans certains pays), il fallait obtenir un diagnostic psychiatrique et effectuer certains changements corporels pour être reconnu·e comme une personne trans. Aujourd’hui, une personne peut se revendiquer trans si elle a la conviction intime que son identité de genre ne correspond pas au genre qui lui a été assigné à la naissance, sans aucune condition médicale ou psychologique.
“J’ai toujours été très conciliant, et comme on m’a toujours dit que j’étais une fille, je ne me suis jamais vraiment posé de question. Pourtant, j’ai toujours senti que quelque chose n’allait pas, que j’étais différent des autres. À l’adolescence, j’ai essayé de rentrer encore plus dans les cases, j’étais vraiment la jeune fille la plus classique possible. Puis, bien plus tard, j’ai eu une grosse période de remise en question suite à un burn-out et une de mes décisions a été d’enfin faire face à qui j’étais vraiment. J’ai donc commencé ma transition. Maintenant, en y repensant, si j’avais su que la transidentité existait et si j’avais su m’affirmer plus tôt, j’aurais peut-être pu être un jeune garçon heureux. Mais je ne regrette rien à mon parcours, il a forgé qui je suis.”
On retrouve beaucoup d’exemples de parcours trans dans l’histoire, mais ceux-ci ont longtemps été effacés par les historien·nes véhiculant des valeurs cishétéronormatives. Dans certaines cultures non-européennes, les personnes vivant en-dehors des cases “homme” et “femme” existent depuis toujours. C’est notamment le cas dans les peuples autochtones nord-américains où vivent des personnes bispirituelles, ou en Inde, où on trouve la caste des Hijras.
La visibilité des personnes transgenres est grandissante ces dernières décennies, notamment grâce à une acceptation croissante des personnes qui vivent hors de la norme cis-hétéro, ce qui peut donner l’impression à certain·es que les personnes trans et non-binaires sont une “invention récente”, une “mode” : ce n’est pas le cas. Une meilleure acceptation mène à ce qu’une plus grande partie de la population se reconnaisse dans ces identités et se sente légitime et capable de les assumer au grand jour, plutôt que de vivre caché·e. Plus la société est inclusive, plus les personnes transgenres peuvent s’affirmer.
Les chiffres exacts de prévalence des personnes transgenres dans la population varient selon les études : certaines estiment qu’il y a 0,2 % de personnes trans dans la population mondiale, d’autres vont jusqu’à 2 ou 3 %, voire plus. Cela dépend de ce qui est mesuré : les changements administratifs, les transitions médicales, ou si l’on pose simplement la question aux individu·es. Dans une enquête démographique de 2020, la prévalence de personnes se déclarant transgenre ou non-binaire était de 4,5% chez les adultes et de 8,4% chez les enfants et adolescent·es.
Les personnes trans sont diverses : enfants, adultes, seniors, de tous horizons professionnels et culturels. Elles sont toutefois confrontées à :
L’Institut pour l’Egalite des Femmes et des Hommes rapporte que les personnes trans sont particulièrement ciblées par la discrimination dans le domaine du travail, mais également des assurances et des soins de santé.
“Le plus grand défi pour moi s’est passé durant la puberté, où ce corps qui était le mien changeait dans une direction qui ne reflétait pas qui j'étais. Cela m’excluait immédiatement du groupe social auquel je me sentais intrinsèquement liée. Je peux dire que pour moi, c'est cette confrontation qui a amené le premier mal-être.”
Depuis quelques années, les personnes transgenres sont la cible de campagnes politiques et médiatiques “anti-genre”, qui reposent sur :
Ces discours alarmistes alimentent les préjugés et fragilisent davantage les parcours de vie des personnes trans.
“J’ai dû évacuer mon appartement parce que j’ai reçu des menaces. Beaucoup de monde a peur actuellement. Il y a tellement de désinformation qui circule, mais elle est présentée comme des faits.”
Les personnes transgenres et non-binaires ont toujours fait partie de la société, mais grâce à l’évolution des mentalités et au militantisme des personnes concernées, elles connaissent une plus grande visibilité qui leur permet de ne plus vivre cachées ou en marge de la société.
Cependant, malgré des avancées législatives récentes, les parcours de vie des personnes trans restent précaires, sujets à une discrimination et une violence accrue. La difficulté d’accès aux soins et au logement, ainsi que la discrimination à l’embauche persistent particulièrement.
En outre, la transidentité a été instrumentalisée par des mouvements réactionnaires afin d’alimenter les peurs infondées autour d’un “ennemi” amorphe et inexistant, réutilisant des tactiques ayant porté leurs fruits contre la population homosexuelle dans les années 80 et 90.
Les personnes transgenres font partie des groupes de population les plus fragilisés à l’heure actuelle. Pour combattre leur stigmatisation accrue, il est essentiel de continuer à s’informer et à lutter pour le respect des droits fondamentaux auxquels chacun·e a droit, indépendamment de son identité de genre.
Merci à Cailean Dangreau pour son aide précieuse dans la rédaction de cet article.
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